Le devoir de loyauté : une arme juridique abusive qui nuit à l’intérêt public

Par: Stéphane Imbeault, Henri Vézina, Julien Fecteau Robertson, Simon Rousseau-Lesage, Olivier Collin, Marie-Claude Chénier, Alexandre Côté et Gabrielle Thibeault-Brisson, enseignantes et enseignants du département de philosophie.

 

La FEC lance cette session une campagne visant à promouvoir la liberté académique et à faire modifier les lois qui la contraignent inutilement. Cela inclut entre autres le devoir de loyauté, concept issu de l'entreprise privée, qui permet à l’employeur de sanctionner un travailleur pour avoir nui à son image. Cela confère évidemment un pouvoir arbitraire aux gestionnaires, puisque ce qui peut nuire à une image est hautement subjectif. 

L’un de nos membres en a malheureusement fait les frais il y a deux ans. Cet épisode a sérieusement inquiété le reste de notre département. La Direction s’est engagée à plusieurs reprises à nous rencontrer, ou du moins à donner des balises plus claires sur sa manière d’appliquer ce genre de sanction. Elle a malheureusement renié son engagement à chaque fois, souvent en choisissant carrément de nous ignorer. Il est difficile, voire désarmant, pour le personnel enseignant de devoir respecter des balises qui demeurent aussi imprécises. Alors de deux choses l’une : ou bien telles balises n’existent tout simplement pas, ou bien la Direction n’a pas intérêt à nous les communiquer puisqu’elle se priverait ainsi d’un puissant outil de censure et de contrôle. 

Cette loi va carrément à l’encontre de toute lutte syndicale pour améliorer les services publics au Québec. Nombre d’infirmières et d’enseignant.e.s ont déjà été sanctionné.e.s en vertu de ce « devoir de loyauté ». Leur véritable offense? Avoir critiqué l’état lamentable des réseaux de santé et d’éducation publics. Pour défendre l’intérêt public, il faut pouvoir nommer ouvertement ce qui ne fonctionne pas. S’opposer au devoir de loyauté est donc une position élémentaire que devrait adopter tout le mouvement syndical québécois.

C’est la raison pour laquelle nous avons demandé à notre exécutif de mettre le point à l’ordre du jour de l’assemblée générale du 3 décembre, afin que notre syndicat prenne formellement position contre le concept même de devoir de loyauté. Nous espérons évidemment que cette revendication pourra remonter au-delà de notre sphère locale, notamment via l’actuelle campagne de la FEC. Nous espérons cependant surtout envoyer un message clair à la nouvelle direction de l’établissement. Si elle souhaite vraiment faire preuve de plus d’ouverture, de collégialité et de reconnaissance que par le passé, voici un geste concret qu’elle pourrait immédiatement poser : s’engager formellement à ne plus utiliser cette loi abusive pour nous sanctionner.

Le sujet sera éventuellement abordé en conseil syndical et lors d’autres rencontres au besoin afin de partager la réflexion avec les collègues de l’ensemble des départements. Nous espérons pouvoir compter sur l’appui, la participation et surtout l’éclairage de nos collègues face à ce problème.