La coupe à moitié pleine : retour sur les négos

Philippe De Carufel, responsable de la coordination et des pratiques syndicales

 

Le 23 décembre dernier, à la fin d’une période d’échanges intensifiés de 10 jours, le comité de négociation de l’ASPPC parvenait à un projet de règlement global sur les matières sectorielles.  Plusieurs ont qualifié cette négociation d’historique, même si on peut se garder une p’tite gêne et laisser l’Histoire en juger d’elle-même. N’empêche : la nature de nos demandes, la mobilisation de nos membres, le soutien de la population et la façon dont le gouvernement a (mal) géré ses mêlées publiques; il n’y avait là rien de banal. De part et d’autre les attentes étaient grandes, fortes. Certaines de ces aspirations que nous avions entretenues dès le début de négociation et même jusqu’à la toute fin, surtout en ce qui concerne l’allégement de la tâche, n’ont pas fait partie des gains obtenus. Nos demandes n’ont pas pu toutes être satisfaites malgré l’exaspération et les séquences de grève, malgré qu’elles aient été déterminantes, signifiantes, nécessaires. Certaines de nos demandes ont mordu la poussière, tout comme certaines de la partie patronale, il faut aussi le reconnaître.

Il faut également reconnaître que le comité de négo est allé chercher énormément de ressources et d’argent dans les coffres d’un gouvernement réfractaire et fermé à la limite de l’insolence qui faisait la sourde oreille aux besoins exprimés par les profs. Nos demandes n’ont pas toutes été satisfaites, disais-je, mais elles ont été entendues. Nous sommes partis de peu de choses dans cette négo-ci. Dans les premiers dépôts patronaux, nous n’étions jamais prioritaires, mais plutôt les grands oubliés, comme si le fait d’’être moins nombreux que les enseignant.es du primaire et du secondaire nous rendaient moins importants aux yeux du gouvernement. Il a fallu attendre décembre dernier pour nous retrouver dans l’agenda de la ministre. 

À Rimouski, nous avons finalement adopté à 90 % l’entente de principe de la table centrale qui traite des dispositions financières liées au salaire, aux congés, aux assurances ainsi qu’à la retraite, et nous nous sommes prononcés à 69 % en faveur de l'entente sectorielle portant sur les clauses normatives propres à notre profession. Pour en arriver là, nous avons dû prioriser, choisir, élaguer, mettre de côté des éléments pour en favoriser d’autres. Dans un contexte d’alliance qui sous-entend des réalités diversifiées toutes aussi valables les unes que les autres et des préoccupations différentes que l’on enseigne à Rimouski, à Rosemont ou à Trois-Rivières, il y a aussi eu des déceptions et des insatisfactions. Mais des portes ont été ouvertes pour la prochaine négo et de nombreux gains importants ont été obtenus, notamment la majoration des échelons, le déploiement de l’enseignement à distance désormais balisé, l’amélioration des droits des MED, la possibilité de scinder des tâches ou encore l’ajout des ETC pour l’enseignement clinique (stages) en Soins infirmiers qui sont considérables. 

Nous en sommes maintenant dans les dernières étapes de la négociation. Notre fédération a entériné, le 15 février, l’adhésion de ses membres à l’entente de principe. La rédaction de la convention est donc en chantier et nous devrions, selon toutes vraisemblances, être en mesure de la signer d’ici la fin du printemps. Bientôt viendra le temps des bilans pour s’approprier l’histoire de notre négociation, ses angles morts et les chemins que nous ne voulons plus emprunter. Il sera nécessaire d’évaluer le rôle qu’aura joué le contexte socioéconomique dans notre adhésion collective à des propositions qui ne nous conviennent qu’à demi. À nous de choisir la coupe à demi pleine ou à demi vide, selon ce que nous souhaitions.