J’aimerais commencer par vous remercier, toutes et tous, d’avoir fait des 21, 22 et 23 novembre derniers un succès d’organisation, un succès de mobilisation et également un succès d’implication. Merci d’avoir répondu à l’appel en si grand nombre et merci pour votre présence qui s’est orchestrée de si belle façon : les sourires le matin dans le grand frette, les galettes maison à partager, les coups de main à l’exécutif, les mots d’encouragement tout au long des trois jours, les échanges intéressés et intéressants sur l’avancée des négos, et la bonne humeur contagieuse sur les lignes de piquetage.
Nous étions en grève non pas parce que nous voulions en arriver là, mais bien parce que c’est là où le gouvernement nous a trainés de force. C’était un pas de plus vers notre prochain contrat de travail. Après un an de négociations, des dizaines de rencontres aux tables, beaucoup d’échanges à travers les médias, des actions de mobilisation et de visibilité partout au Québec, une manifestation monstre qui a rassemblé 100 000 personnes dans les rues de Montréal et des mandats à 95 % dans tous les syndicats, on pourrait presque croire que le gouvernement attendait cette première séquence de grève pour commencer à bouger, comme s’il testait notre détermination.
Juste avant d’amorcer notre séquence de grève de la semaine dernière et en réponse à une demande déposée par le Front commun, le gouvernement a mandaté un conciliateur afin d’en « arriver le plus rapidement possible à une entente négociée » avec les syndicats. Agissant comme médiateur, il devrait aider les parties à réévaluer leurs demandes et à faire de l’élagage dans celles-ci. Par contre, le conciliateur ne peut intervenir que sur les questions qui ne sont pas salariales. Ça tombe bien, ce sont justement sur ces éléments que les gains auront été les moins intéressants lors des précédentes négos : les augmentations salariales venaient justifier l’impossibilité d’investir ailleurs. « Too bad, on se reprendra la prochaine fois », qu’on se disait souvent. Et si c’était c’te fois-ci? Les syndicats sont plus que jamais déterminés à améliorer leurs conditions de travail et souhaitent s’extirper du simple discours salarial que les médias ont tendance à mettre de l’avant.
Si certains espèrent qu'un règlement est toujours possible d'ici les Fêtes, il n’en demeure pas moins qu’il y a beaucoup de travail à faire. C’est nono, mais je ne sais pas si ce que j’écris présentement sera toujours d’actualité quand ça se rendra à vous, dans quelques jours. On a beau dire depuis des mois que la négo stagne et que les échanges font du surplace, n’empêche que les dernières semaines auront généré une pression importante sur le gouvernement et que celui-ci n’a plus tellement le choix d’adopter une approche proactive. Mais si l'impasse persiste à la table de négociations malgré l'ajout de trois jours de pourparlers entre le gouvernement et les syndicats la semaine dernière, il est maintenant un peu plus difficile d’avoir un état des lieux clair : une réelle volonté de négocier émerge alors que la menace d’une grève générale illimitée fait son chemin. Le moment est venu pour monsieur Legault de passer de la parole aux actes. Le moment est venu pour lui d’investir dans les services publics à la hauteur des besoins exprimés. Les caquistes ont basé une grande partie de leur campagne électorale sur la nécessité d’améliorer les conditions en éducation et en santé comme étant des priorités : ça fait quatre dépôts patronaux qu’on attend qu’il nous le montre!
Si la population continue d’appuyer les revendications syndicales, Sonia Lebel poursuit sa campagne de désinformation médiatique sur heure de grande écoute dans l’objectif de ramener l’opinion publique de son bord. Elle parle d’augmentation salariale « historique » frisant les 15%, alors que l’offre est plutôt un simple rattrapage qui maintient toujours le salaire des profs à 23% sous la moyenne canadienne. Lorsque Sonia Lebel réclame plus de flexibilité dans le réseau de l’éducation, elle fait notamment référence aux contrats des enseignants précaires qui relèvent d’une clause des conventions collectives locales. Et on s’entend que pour élaborer des contrats en mai à partir d’éléments qui se déterminent en juin et juillet et qui sont connus en août, ça prend de la souplesse catégorie Cirque du Soleil. Nous sommes tellement flexibles quand vient le temps de faire beaucoup avec peu, me semble que c’t’une drôle de demande après un an et demi de discussions qui tournent en rond. Les autres flexibilités attendues pourraient aussi porter le nom « d’entourloupes aux conditions de travail négociées préalablement pour assurer un respect des travailleurs », avec des possibilités de travailler en dehors d’un cadre horaire préétabli ou bien de faire du surtemps à la demande.
Nous étions plus d’un demi-million la semaine dernière à nous priver de salaire, à sortir dans les rues pour demander au gouvernement de se préoccuper autant du bien commun qu’il se préoccupe des loisirs. Nous étions plus d’un demi-million à dire que la santé et l’éducation, ces deux piliers sur lesquels repose notre société et dont le bon fonctionnement est le mandat fondamental du gouvernement, sont mal en point. Que ça prend des investissements, qu’il faut considérer les employés qui portent à bout de bras l’ensemble des services offerts à toute la population et qu’il faut fixer des conditions de travail concurrentielles.
Nous étions en grève et y retournerons s’il le faut parce que nous voulons protéger nos services publics. Nous étions en grève et nous reprendrons le même chemin si le gouvernement continue de mettre à mal les bases de notre société en refusant d’y offrir les moyens de ses ambitions. Ne pas être une priorité, ce n’est pas une option. Le gouvernement refuse d'envisager les demandes syndicales, notamment parce qu’il les estime à 12 milliards et qu’il nous faut être financièrement prudents… Nous étions un demi-million la semaine dernière à lui répondre que c’est une question de choix, de priorité, de vision sociale et de besoins sociaux.
10 milliards pour un 3e lien, ça ne semble pas poser problème. 12 milliards pour créer des millions de liens entre chaque citoyen, pourquoi ça serait moins important?