« Maman, les petits bateaux qui vont sur l’eau ont-ils des jambes ? Mais oui, mon gros bêta, s’ils n’en avaient pas, ils n’avanceraient pas. » Une histoire de rentrée

Marie-Josée Boudreau, responsable de la coordination et des pratiques syndicales

Noak m’a demandé un texte sur la rentrée du trimestre d’hiver 2022.

J’ai dit oui.

 

J’ai un peu regretté la chose, je l’avoue. Par manque de temps, vous dites-vous. Hum. Par manque d’inspiration, surtout. C’est qu’en retournant lire les messages et les articles que j’ai pu écrire aux derniers trimestres, force est d’admettre que mes textes de début de trimestre se ressemblent tous, malheureusement. Je vous les résume : il y a des problèmes, nous avons travaillé fort pour essayer de les régler, il en reste encore, nous ne lâchons pas la Direction d’une semelle pour tenter d’arriver à des solutions : si ça continue, la majorité des écueils seront évités sous peu. 

 

Silence à la croisée de l’effet dramatique, du découragement et de l’espoir (heureusement pour vous, ce n’est pas un quatre stops).

 

En fait, en tentant d’amorcer mon texte de diverses façons sans me répéter, je me suis aperçue que je dérivais, que malgré moi, c’est d’engagement syndical local dont je me mettais à parler. De son sens, surtout. Et du cégep, un peu.

 

Parce qu’un dossier comme celui de la rentrée en temps de pandémie est complexe et montre les failles de notre institution. Le cégep est une grosse machine, un gros bateau (d’où l’Embarquement 2022, peut-être ?). Son temps de réaction est long et ce fait est amplifié par sa difficulté à s’adapter lorsqu’une personne est absente - et les absences et les changements de chaise sont fréquents. Conséquence : il est long et fastidieux d’instaurer des mesures qui impliquent plus qu’un service, surtout si elles doivent être appliquées à l’ensemble des cours ou du personnel enseignant. Alors on répète à une Direction ce qu’on avait déjà dit à l’autre, et par le temps qu’un troisième service prenne l’information et tente de la communiquer, il y a d’énormes risques que le tout ait dérivé.

 

Pourtant, dans ce mastodonte naval (les syndicalistes aussi savent utiliser les métaphores de transport, il faut croire), il existe des personnes très efficaces. Elles sont même nombreuses. C’est ce qui fait que nous arrivons à régler de nombreux cas individuels rapidement. Si un membre me contacte et que régler son problème ne demande qu’à contacter un individu dans la boîte, ce sera rapide, efficace. Presque facile. De part et d’autre, avec notre Direction, une relation de confiance s’est installée. Cela facilite la gestion de plusieurs problématiques et cela permet de travailler beaucoup de choses en amont.

 

Mais il reste encore la puissance d’inertie du paquebot, la difficulté de le faire avancer si tous ne gardent pas le même cap. Et la patience (et l’exaspération) de représentantes et de représentants syndicaux qui répètent, qui identifient des problèmes, qui cherchent des solutions, qui consultent leurs membres et qui ne lâchent pas. Jamais. 

 

«Ça va, Marie-Josée ? Survivez-vous, au syndicat ?», me demandez-vous gentiment dans les couloirs du cégep. «Correct, pas pire», que je vous réponds toujours à la blague. La vérité, c’est qu’en général, ça va bien. Ça va parce qu’on en gagne beaucoup plus qu’on en perd et on avance tous les jours, même si c’est parfois beaucoup trop lentement pour moi. Ça va parce que les membres nous soutiennent et nous inspirent. Ça va parce que j’ai confiance qu’il y aura une relève syndicale. Ça va parce que je suis convaincue que tout ça a un sens.

 

Je voulais vous entretenir de la rentrée et je vous parle de la beauté de l’engagement syndical et de son importance. Pour moi. Pour vous. Pour nos conditions de travail. Pour la qualité de l’enseignement. Pour donner une voix à tous et à toutes. Pour inspirer nos étudiants et étudiantes à se commettre pour les causes qui leur sont chères.

 

La rentrée ? Il y avait des problèmes, il y en a encore, mais moins. Nous avons travaillé fort pour essayer de les régler, nous y travaillons encore. 

 

Il était un petit navire…