La FEC et le processus démocratique

Alain Dion, coordonnateur

Les 22 et 23 novembre derniers, le Syndicat des enseignantes et enseignants du Cégep de Rimouski (SEECR) participait au Conseil général (CG) de la Fédération des enseignantes et enseignants de cégep (FEC-CSQ), instance réunissant les 13 syndicats membres de la fédération. Comme la négociation de notre prochaine convention collective approche à grands pas, le cœur de notre rencontre était l’élection du comité qui représentera les membres de la FEC à la table des négociations.

Pour les déléguées et délégués du SEECR, cette élection prenait un sens particulier car, à la mi-octobre, nous avions soulevé certaines interrogations concernant l’intervention du Bureau exécutif de la FEC dans le processus d’élection.

Un bref retour en arrière

En septembre dernier, le Conseil général adoptait les règles devant mener à l’élection du comité de négociation de la FEC-CSQ. La décision prise à ce moment statuait que le comité de négociation serait formé de quatre personnes, dont un maximum de deux personnes du Bureau exécutif. Cette règle était importante pour les syndicats, car elle clarifiait deux choses : nous n’interdisions pas aux membres du Bureau exécutif de se présenter aux élections, mais nous limitions leur présence à ce comité; et lors de l’élection, nous pourrions même choisir d’élire deux, trois ou même quatre membres issus de nos syndicats. Nos règles favorisaient ainsi la participation des membres de la fédération et assuraient une représentation variée à cet important comité. 

En quittant l’instance de septembre, les syndicats avaient donc le mandat de solliciter des candidatures dans leur collège. L’élection de novembre allait permettre d’élire librement et démocratiquement les quatre membres qui allaient siéger au comité de négociation.

Maximum ou minimum?

Le 19 octobre, le Bureau exécutif de la FEC-CSQ faisait parvenir un courriel à l’ensemble des syndicats de la fédération. Nous avons été interloqués de lire que le Bureau exécutif revenait sur la décision du Conseil général de septembre, en suggérant maintenant d’élire non pas un maximum, mais un minimum de deux de leurs représentants en prétextant entre autres « l’expertise politique et technique acquise […] et la possibilité de rapporter de façon fluide et transparente l’information du comité de négociation à l’exécutif de la Fédération ». S’ajoutaient à cela des « raisons financières qui militent [selon eux] en faveur de la candidature de deux personnes issues du Bureau exécutif, soit Éric Denis, vice-président et Micheline Rioux, trésorière ».

Le processus électoral qui devait se faire de manière libre et démocratique se voyait donc orienté. On insistait maintenant sur l’élection d’un minimum de deux membres du Bureau exécutif en laissant planer des difficultés financières. On sous-entendait également que dans nos syndicats locaux, nous ne retrouvions peut-être pas l’expertise politique et technique pour faire le travail.

Pour le SEECR, cette intervention politique du Bureau exécutif était totalement inacceptable. Nous avons donc fait parvenir un courriel à la FEC-CSQ et à l’ensemble des syndicats pour exprimer notre étonnement de voir une décision prise en Conseil général être ainsi bafouée, courriel auquel nous n’avons reçu qu’un accusé réception.

La démocratie ou l’argent

Nous nous attendions donc à obtenir des clarifications au conseil Général du mois de novembre. Pour le SEECR, il était évident que le Bureau exécutif devait revenir sur sa position et reconnaitre que le processus électif avait été vicié. Malheureusement, les informations fournies lors du conseil général et la manière de procéder ont plutôt amplifié notre malaise.

En effet, après avoir mentionné « un courriel » reçu, le Bureau exécutif y allait d’une longue démonstration mathématique qui tentait de faire la preuve (plutôt inquiétante d’ailleurs) que la fédération n’avait pas les moyens de dégager plus de deux personnes autres que les membres du Bureau exécutif pour la prochaine négociation. À une question éminemment politique, le Bureau exécutif répondait par un argumentaire à peu près strictement financier, imposant ainsi sa vision et ignorant nos interrogations légitimes concernant le processus démocratique.

Qui plus est, le Bureau exécutif poussait l’odieux en laissant la trésorière ­(qui, rappelons-le, était candidate à l’élection, recommandée par le Bureau exécutif) faire cette présentation. En plus d’être en flagrant conflit d’intérêts, la trésorière portait un message on ne peut plus clair : si le Conseil général ne votait pas pour les deux membres du Bureau exécutif, la fédération n’aurait pas les moyens de faire la négo. Le spectacle était assez désolant. Plusieurs syndicats sont d’ailleurs intervenus dans le débat, reprenant parfois certains des arguments du SEECR et soulevant d’autres questionnements. On comprenait mal, notamment, comment le Bureau exécutif avait pu soutenir publiquement et à l’avance des candidatures, alors que les membres de nos syndicats souhaitant se présenter restaient dans l’ombre jusqu’au jour de l’élection, où on leur accorderait un gros trois minutes pour se présenter.

À la lumière d’un tel déni démocratique, d’une telle fin de non-recevoir, d’un tel manque d’écoute de la part du Bureau exécutif, les déléguées et délégués du SEECR ont décidé de quitter le conseil général avant la fin des travaux pour marquer clairement leur désaccord avec le processus et les positions du Bureau exécutif.

Des interrogations

Depuis, nous avons eu un bref échange avec la présidente de la FEC-CSQ. Nous avons répété nos griefs et nos arguments. Mais comme le conseil général est derrière nous et que l’élection du comité de négociation est maintenant chose faite, il nous semblait plutôt incongru de recevoir cet appel au dialogue de la part de la fédération.

Nous n’en sommes pas à nos premiers désaccords avec la fédération. Encore récemment, lors de la consultation sur de possibles alliances lors de la prochaine négociation, l’Assemblée générale soulignait sa déception quant aux résultats et certains évènements survenus lors de la dernière négociation. Et que faut-il retenir de la répétition de ce type d’évènements? Comment interpréter cet entêtement du Bureau exécutif à imposer sa vision des choses? Que conclure de ce fossé politique et démocratique qui s’est creusé au fil des ans? Et avec la négociation qui se pointe, que se passera-t-il quand nos assemblées générales auront à être consultées? Est-ce que l’on cherchera à nous imposer des décisions de cette manière?

Une chose est sûre, au SEECR, ce n’est pas à cette forme de démocratie que nous puisons l’essence de notre lutte syndicale. Nous vous invitons donc à venir échanger avec nous à ce sujet le 11 décembre prochain en assemblée générale. Nous vous proposerons entre autres d’amorcer une réflexion sur notre avenir syndical à la FEC-CSQ.