La session d’hiver est déjà lancée depuis quelques semaines, mais le Comité de coordination syndicale tenait à vous souhaiter, à toutes et à tous, une très bonne rentrée hivernale 2020. Que cette nouvelle session soit riche en réussites pédagogiques et en réalisations personnelles de toutes sortes.
Syndicalement, la session qui s’amorce devrait être fort occupée au Syndicat des enseignantes et enseignants du Cégep de Rimouski (SEECR). Aux dossiers syndicaux locaux qui sont présentement sur la table de travail du SEECR, nous devons maintenant ajouter plus spécifiquement celui de la négociation de notre prochaine convention collective, qui rappelons-le, vient à échéance le 31 mars 2020. En effet, après des mois de consultations des profs de cégep, la négociation s’est véritablement mise en marche au cours de l’automne avec le dépôt de nos revendications syndicales à la table de négociation nationale à la mi-octobre. En décembre dernier, c’était au tour du gouvernement et de nos directions de cégep de déposer des « offres » patronales. Extrêmement décevante, cette réponse de nos vis-à-vis patronaux laisse d’ailleurs présager des négociations pour le moins difficiles.
Le trimestre que nous entreprenons devrait donc offrir bon nombre d’occasions de nous rencontrer et d’échanger ensemble. La négociation d’une convention collective est un moment clé de notre vie syndicale. Améliorer nos conditions de travail et nos conditions d’enseignement, soutenir les enseignantes et les enseignants à statut précaire, assurer notre autonomie professionnelle et départementale, et favoriser le recrutement et la rétention de nos futurs collègues sont au cœur de nos légitimes revendications. À cela s’ajoutent, bien sûr, des augmentations salariales qui suivent au moins l’inéluctable augmentation du coût de la vie. Souhaitons-nous maintenant la solidarité, la cohésion et la mobilisation nécessaires pour mener à bien cette négociation.
Un mémoire des plus inquiétant
Au cours des dernières semaines, le SEECR a mis la main sur un document passablement troublant de la Fédération des cégeps, qui représente les directions de nos collèges. Ce mémoire présenté au ministère des Finances dans le cadre des consultations prébudgétaires 2020-20212 contient un argumentaire et des propositions qui soulèvent à la fois inquiétudes et incrédulité.
Nous l’avons vu en décembre dernier, les représentantes et représentants de nos directions de collèges ne proposaient aucune mesure visant à améliorer nos conditions d’enseignement. Les propositions patronales suggéraient plutôt de revoir les rôles des coordinations de programmes, de clarifier les rôles et responsabilités de l’assemblée départementale relativement à leur participation à la gestion des programmes et, surtout, ils proposaient de transférer une partie des ressources de coordination vers les programmes. En fait, ils attaquent le fondement même de notre vie collégiale et disciplinaire.
Voilà que, dans le mémoire déposé au ministère des Finances, nos directions de collège en remettent, défendant une vision de l’enseignement collégial qui risque de mettre en place une structure pédagogique qui reléguerait l’enseignante ou l’enseignant au statut de simple exécutant.
Dans un discours des plus opaque et technocratique, la Fédération des cégeps souhaite « rehausser la productivité du Québec et répondre aux besoins du marché du travail ». Pour ce faire, elle revendique entre autres la mise en place « d’équipes multidisciplinaires qui regrouperaient des enseignants-ressources (!), des conseillers pédagogiques et d’autres intervenants, aides pédagogiques et orthopédagogues par exemple, qui seraient vouées au déploiement des pratiques d’enseignement à impact élevé » (!?) et « le développement pédagogique et didactique nécessaire chez les enseignantes et les conseillers pédagogiques ». Elle prône également « le déploiement numérique afin de soutenir l’accessibilité et la réussite étudiante » (!?) et demande que le ministère de l’Éducation « embauche 48 spécialistes pour répondre aux différentes demandes d’information [lire reddition de compte] des différents ministères ».
Dans ce mémoire, la Fédération des cégeps semble véritablement abdiquer ses responsabilités de gardienne d’un enseignement humaniste, pour le plier aux exigences du marché du travail et des nouvelles tendances à la mode dans le monde de l’enseignement. Il est finalement pour le moins choquant de voir nos directions de collège se contenter de revendiquer du personnel supplémentaire pour répondre aux redditions de compte des différents ministères plutôt que de dénoncer cette approche affairiste et productiviste. Triste constat, il faut l’avouer.
Je soulignais d’entrée de jeu que la négociation de notre prochaine convention collective s’annonçait ardue. Force est de constater, à la lumière de cette prise de position de la Fédération des cégeps, que nous aurons non seulement à lutter ardemment pour améliorer nos conditions de travail, mais que nous devrons aussi nous opposer localement et nationalement à une conception de l’enseignement collégial qui nous éloigne de notre mission première : accompagner des jeunes en leur offrant une formation qui les prépare à l’université ou au marché du travail, mais aussi une formation citoyenne et critique qui leur permettra de faire face eux aussi aux défis du 21e siècle.